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Citroën CXA : L’incroyable histoire des CX « made in USA » vendues contre la volonté de Citroën

Au milieu des années 70, la Citroën CX était une déclaration audacieuse, mais interdite aux USA. C’était sans compter sur CXA, qui, contre l’avis de Citroën, a importé et modifié ces voitures pour une poignée de passionnés

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Au milieu des années 70, la Citroën CX était une déclaration audacieuse : un design futuriste, une suspension hydropneumatique révolutionnaire et un confort impérial. Mais pour le marché américain, un mur réglementaire la rendait aussi désirable qu’interdite. C’était sans compter sur une poignée d’entrepreneurs obstinés qui, contre l’avis même de Citroën, ont décidé de faire entrer la déesse de la route en Amérique par la grande porte du « marché gris ».

Le Rêve Américain Interdit de Citroën

Citroën CXA : L’incroyable histoire des CX « made in USA » vendues contre la volonté de Citroën

Le lancement de la CX en 1974 coïncidait avec un durcissement drastique des normes de la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) aux États-Unis. Pour être vendue, toute voiture devait se conformer à des exigences strictes : pare-chocs résistant à un impact de 5 mph (8 km/h), phares scellés standardisés et normes d’émissions de plus en plus sévères. Mais le coup de grâce fut l’interdiction pure et simple des systèmes de suspension à hauteur variable, une mesure initialement conçue pour contrer les « lowriders » mais qui frappait directement au cœur de l’identité de Citroën. Pour la marque aux chevrons, qui venait de se retirer du marché américain après l’échec de la SM, l’homologation de la CX était un casse-tête financier et technique insurmontable. L’Amérique, officiellement, n’aurait pas de CX.

L’Audace de CX Automotive (CXA)

Citroën CXA : L’incroyable histoire des CX « made in USA » vendues contre la volonté de Citroën

Là où une multinationale voyait un obstacle, un homme d’affaires du New Jersey, George Teasos, vit une opportunité. Convaincu que la CX était « la meilleure voiture du monde », il fonda CX Automotive (CXA) avec une mission simple mais follement ambitieuse : importer des CX neuves d’Europe et les « fédéraliser », c’est-à-dire les modifier pour les rendre conformes aux normes américaines. CXA n’était pas un simple importateur ; c’était un véritable petit constructeur artisanal. L’entreprise achetait des voitures en France et aux Pays-Bas, les expédiait aux États-Unis et commençait un processus de transformation long, complexe et surtout, extrêmement coûteux.

La « Fédéralisation » : Un Casse-Tête à 10 000 $

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Modifier une CX pour le marché américain n’était pas une mince affaire. Les magnifiques phares sous verrière, signature du design de Robert Opron, étaient remplacés par des blocs optiques ronds ou rectangulaires scellés, souvent disgracieux. Les fins pare-chocs européens laissaient place à des poutres renforcées, plus proéminentes et lourdes. Sous le capot, les moteurs, notamment le 2.4L de la GTI, étaient équipés de convertisseurs catalytiques pour passer les tests anti-pollution, ce qui amputait une partie de leur puissance. Le défi le plus absurde restait la suspension : pour se conformer à la loi, CXA devait la bloquer ! Le système hydropneumatique restait actif pour le confort, mais le réglage manuel de la hauteur de caisse était désactivé, privant la voiture de l’une de ses fonctionnalités les plus iconiques. Chaque conversion coûtait, selon les estimations de l’époque, entre 7 000 et 10 000 dollars, une somme colossale qui venait s’ajouter au prix d’achat de la voiture.

Des Modèles d’Exception pour une Clientèle de Niche

Citroën CXA : L’incroyable histoire des CX « made in USA » vendues contre la volonté de Citroën

En raison de ces coûts, une CXA n’était pas bon marché. Au début des années 80, une CX GTI ou une Pallas vendue par CXA pouvait atteindre 35 000 $, soit le prix d’une Mercedes-Benz ou d’une Porsche 911. La clientèle était donc ultra-sélective : des architectes, des avocats, des célébrités et des passionnés d’automobile européenne qui recherchaient l’exclusivité absolue et le confort inégalé de la Française. Les modèles les plus prisés étaient la CX 2400 Pallas, la sportive GTI, et surtout la version longue Prestige, une véritable limousine avec un espace aux jambes royal. CXA aurait même vendu quelques breaks, appréciés pour leur volume de chargement phénoménal. On estime que quelques centaines de voitures seulement ont été ainsi modifiées et vendues, faisant de chaque CXA un objet de collection rare.

La Bataille du « Marché Gris » Contre Paris

Citroën CXA : L’incroyable histoire des CX « made in USA » vendues contre la volonté de Citroën

Cette opération se déroulait sans la moindre bénédiction de Citroën à Paris. Pire, la maison mère voyait d’un très mauvais œil cette initiative qui engageait l’image de la marque sans aucun contrôle qualité de sa part. Citroën refusa systématiquement de couvrir les CXA par sa garantie constructeur. Acheter une CXA était donc un acte de foi : les propriétaires dépendaient entièrement du réseau de CXA et de quelques spécialistes pour l’entretien d’une mécanique déjà réputée complexe. Cette situation de « marché gris » créait une tension permanente, mais elle démontrait aussi la force d’attraction d’un design et d’une technologie si uniques qu’ils inspiraient une telle dévotion.

Citroën CXA : L’incroyable histoire des CX « made in USA » vendues contre la volonté de Citroën

L’aventure de CXA est le témoignage d’une époque où la passion pour l’automobile pouvait encore renverser les barrières bureaucratiques, transformant une impossibilité réglementaire en une saga industrielle unique et fascinante.

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